Les aidants familiaux : Tout ce qu’il faut savoir

Dans la lettre que vous avez envoyée à la presse européenne le 24 juin dernier, vous avez déclaré : « Nous ne renoncerons pas à sauver ne serait-ce qu’une seule vie, car nous avons des siècles de civilisation sur nos épaules… ».

C’est vrai, vous faisiez référence aux migrants, mais on suppose que le concept peut être considéré comme universel, non ?

C’est exactement pour cela qu’on vous écrit, pour que vous preniez conscience du fait que les personnes ayant l’espérance de vie la plus courte des pays occidentaux, en Italie, sont complètement ignorées et maintenues par les institutions dans l’abandon le plus absolu.

Aidants familiaux

On les appelle les aidants familiaux et le fait qu’il n’existe pas de mot italien adéquat pour les désigner en dit long.

Ce sont des personnes qui, face à l’impossibilité de faire des choix appropriés et dignes pour leurs proches, s’occupent à domicile, sans interruption, de membres de la famille non autonomes.

Ne me dites pas que vous savez de quoi il s’agit, car la caresse d’un enfant handicapé dans une réunion publique ou les rapports que vous pouvez lire sur le sujet, rédigés avec la froideur des bureaucrates, ne suffisent pas à comprendre véritablement la condition dans laquelle nous vivons.

Vos techniciens vous diront probablement que ce sont des conneries, qu’il existe des lois spécifiques comme la 104/92… mais que veulent-ils de plus !

Dommage que le fait que nous vivions 17 ans de moins que la population normale ait été démontré par une lauréate du prix Nobel, Elizabeth Blackburn.

Dommage que les lois en vigueur protègent (et même pas bien !) les personnes handicapées et non celles qui s’en occupent.

Que voulons-nous ?

Une chose qui, dans les pays civilisés, est considérée comme prioritaire et indispensable : le respect de nos droits humains.

Êtes-vous surpris et incrédule ?

Pensez-vous que cela ne peut pas arriver dans un pays qui a des siècles de civilisation derrière lui ?

Pourtant, cela arrive tous les jours en Italie et les aidants familiaux vivent la plupart du temps sans aucun soutien institutionnel et ne peuvent donc pas accéder au droit au travail, au repos, aux relations sociales, à l’épanouissement personnel mais, surtout, au droit à la santé, ne pouvant pas se soigner pour guérir !

Il ne serait pas si difficile de faire face à cette grave urgence sociale si seulement le gouvernement recevait des informations correctes sur la situation réelle des aidants familiaux.

En effet, les institutions publiques italiennes, sous prétexte d’une indisponibilité économique minime par rapport aux bénéfices sociaux qui en découleraient, préfèrent investir dans l’éloignement du milieu familial et dans l’accueil des personnes non autonomes, une solution beaucoup plus coûteuse pour toute la communauté.

Ne devrait pas échapper au contraire, cher Matthieu, que dans tous les autres pays de l’Union européenne, à l’exception de l’Italie, même dans ceux qui vivent une situation économique très lourde, la figure de l’aidant familial est accompagnée et soutenue par des lois spécifiques pour lui permettre de continuer à exercer son importante fonction dans des conditions humaines acceptables, puis pendant longtemps, sans devoir succomber à la fatigue, et à l’appui de ce que le bien-être sans cet engagement s’effondrerait inexorablement.

En 2009, la chercheuse Elizabeth Blackburn, comme on l’a mentionné plus haut, a remporté le prix Nobel de médecine avec une étude qui a démontré scientifiquement que le stress auquel sont soumis les aidants familiaux réduit leur espérance de vie de 9 à 17 ans par rapport au reste de la population, mais le fait de l’avoir fait savoir à plusieurs reprises au législateur italien et à toutes les institutions concernées n’a eu aucun de ces effets qui auraient été considérés comme nécessaires ailleurs.

Il n’a pas non plus été prévu – comme une confirmation supplémentaire de l’indifférence totale à l’égard des aidants familiaux – leur inclusion parmi les catégories sauvegardées par la réforme de la sécurité sociale qui, sur la base de l’allongement de l’espérance de vie de la population, a au contraire prolongé de manière incompréhensible leur engagement professionnel qui, ne l’oublions pas, s’ajoute quotidiennement au travail de soins à leurs familles.

Mais il y a aussi de nombreux aidants familiaux qui ont été contraints d’abandonner leur emploi pour garantir l’aide aux soins indispensable à la survie de leurs proches, et qui ont été coupablement ignorés par les services censés les soutenir.

Dans tout le pays, en effet, un soutien minimal est fourni à domicile, sur la base de paramètres incompréhensiblement différenciés sur le territoire national, souvent basés sur la pathologie de l’assisté au lieu de la mesure objective du niveau de besoin.

Cela entraîne de nombreuses familles gravement handicapées vers un appauvrissement progressif, jusqu’à l’indigence totale, ne pouvant disposer que des prestations minimales que l’État accorde aux personnes handicapées.

Compte tenu des montants extrêmement maigres des prestations, qui ne suffisent même pas à maintenir les conditions de soins liées au handicap, ni à combler véritablement le fossé que notre Constitution impose au législateur de combler, ces prestations ont été ciblées pour les transformer, aux yeux des institutions italiennes, en revenu, c’est-à-dire en richesse disponible.

Cette situation devient de plus en plus pesante pour les familles d’aidants, qui sont désormais constamment soumises au chantage de voir un membre de leur famille atteint d’un handicap retiré de son propre noyau affectif pour être admis dans un institut – et cette infliction de conditions fragiles est définie dans notre Code civil comme un « état d’esclavage » aux formes modernes duquel le Pape François a également fait récemment référence – et nous a obligés à renoncer à tous ces droits qui sont considérés comme « fondamentaux » dans le monde.

Non sans amertume pour le constat d’un échec qui est à considérer de tous les citoyens italiens et afin de sensibiliser l’Union européenne, à laquelle notre pays doit se référer également pour ces questions critiques, les aidants familiaux italiens ont commencé une collecte de signatures, qui a jusqu’à présent recueilli des dizaines de milliers d’adhésions, Cette pétition a été incluse dans les actes de la Commission de l’UE pour les pétitions avec procédure d’urgence afin que l’Italie soit exhortée à transformer les déclarations d’intention relatives à la valorisation des familles et des femmes, en mesures spécifiques qui ne se limitent pas à de simples proclamations politiques, mais qui visent réellement à sortir d’une période de crise grave sans en payer le prix sont les groupes les plus fragiles et sans défense des citoyens italiens.

L’Europe nous a donné raison !

Lors de la séance du 17 septembre, au cours d’une audition de notre Coordination à la Commission des pétitions de Bruxelles, la plainte que nous avons déposée dans ce contexte a suscité un grand étonnement quant aux conditions dans lesquelles vivent les aidants familiaux italiens et a conduit à l’engagement d’inciter le gouvernement italien à prendre les mesures appropriées.

Recommandations 

Nous vous demandons donc d’inclure parmi les priorités de votre gouvernement la promotion de la reconnaissance des protections minimales pour les aidants familiaux – telles que la santé, la sécurité sociale et le bien-être – compte tenu du travail de soins que nous supportons chaque jour sans interruption sans accès aux vacances, au repos nocturne garanti, aux congés et même à la possibilité de tomber malade….

Par conséquent, nous vous prions de considérer à votre disposition une délégation d’aidants familiaux qui – de manière compatible avec notre condition difficile – feront de leur mieux pour participer personnellement à une rencontre d’approfondissement que nous vous demandons de NE PAS étendre à des réalités qui – tout en s’auto-reproduisant le droit de nous représenter – n’ont jamais essayé d’esquisser une plainte même minimale de notre condition humaine particulière et difficile.